Neurosciences par-ci, neurosciences par-là : c’est devenu un terme à la mode (neuromanagement, neuromarketing, neuromythes...). Entre promesses révolutionnaires et recettes rapides, difficiles de distinguer le solide du "neurobullshit".
Les neurosciences cognitives servent à comprendre comment nos mécanismes mentaux influencent les décisions et les comportements.
Mais de quoi parlons-nous au juste ? Les neurosciences cognitives servent notamment à comprendre comment le cerveau décide, perçoit le risque, mémorise, fait attention… Vous le voyez le lien avec la vente ? Elles sont donc très utiles pour décoder les clients, aider le vendeur et concevoir des parcours de décision d'achat plus clairs et plus sûrs.
Dans cet article, découvrez pourquoi vous devriez utiliser les neurosciences pour mieux vendre.
Sommaire
- Les neurosciences pour décoder vos clients
- 1. Créer rapidement les conditions qui construisent la confiance
- 2. Parce que les émotions précèdent la raison
- 3. Comprendre les motivations
- 4. Décision d'achat : comprendre et accompagner le processus
- 5. Dépasser les objections
Les neurosciences pour décoder vos clients
En rendez-vous client, vous déroulez un retour sur investissement solide, ça opine, ça sourit… puis rien ne se signe. Ce n’est pas une anomalie : c’est la façon dont un cerveau traite l’information qui peut faire "capoter" (ou réussir) la vente.
L'observation, l'écoute client et une meilleure compréhension des mécanismes mentaux vous permettent alors de mieux comprendre les besoins et problématiques non exprimés de vos prospects. Les neurosciences vous donnent une boussole pour comprendre confiance, émotion, motivation, décision et objections client. C’est la voie royale pour découvrir vos clients et prospects avec un œil neuf.
1. Créer rapidement les conditions qui construisent la confiance
Dès les premières minutes, votre interlocuteur jauge et évalue votre niveau de crédibilité et de prévisibilité. Son cerveau repère les indices très tôt et ajuste l’ouverture de la relation en conséquence. Les neurosciences vous aident à poser les bons marqueurs pour créer ce climat de confiance dès le début de la relation et poursuivre sa construction tout au long du parcours de vente.
La vente, c’est avant tout créer de la confiance entre deux êtres humains. Sans confiance, pas de ventes. C’est aussi simple que ça ! Il existe de nombreux leviers pour créer une ambiance propice à la vente, (le tout premier étant de s'intéresser sincèrement à son acheteur bien sûr !).
Un exemple tout simple : être assis face à face, à 90 degrés ou côte à côte n'a pas le même effet sur votre interlocuteur. Ainsi, en B2B privilégiez la position à 90 degrés alors qu'en B2C être assis côte à côte est un avantage.
Autre exemple : le cerveau déteste l'incertitude, aussi apporter de la visibilité à votre prospect dès le début du rendez-vous avec une pose de cadre. Ainsi, vous ne gérez pas uniquement la dimension professionnelle de l'échange mais également la dimension émotionnelle et les automatismes mentaux.
Enfin, pour avoir confiance en vous, votre prospect a besoin de ressentir l'alignement de votre message, votre congruence : cohérence entre les mots utilisés, l’intonation de votre voix, le rythme de la diction et le langage de votre corps). Vous devez exprimer un accord total avec votre message, qui lui doit être cohérent, clair, concis, concret, convaincu et ciblé client (les fameux 6 C).
2. Parce que les émotions précèdent la raison
Les émotions ne sont pas un frein à la rationalité, mais un composant central de la prise de décision, y compris en contexte d’achat. Sans émotion, il devient presque impossible de choisir entre deux options.
Et oui, je sais bien que c'est difficile à croire, surtout pour le monde du B2B. Pourtant, la science est formelle et l'a plusieurs fois démontré. En exemple : selon une étude de l’Université du Sud de Californie menée par Antonio Damasio (1), les personnes ayant une lésion de la zone du cerveau liée aux émotions sont incapables de prendre des décisions, même les plus simples, malgré un raisonnement intact.
Avant même la comparaison méthodique, le cerveau colle déjà une étiquette à votre proposition : « rassurante » ou « risquée ». Ce tri précoce dirige l’attention, colore l’interprétation des chiffres et influence la suite de l’échange. Ce n’est pas de l’irrationalité : c’est un raccourci adaptatif pour décider vite dans l’incertitude. Ignorer cette étape, c’est argumenter au mauvais étage : vous empilez des preuves alors que votre interlocuteur cherche d’abord à se sentir en sécurité.
Saviez-vous que 70 à 95 % des décisions d’achat sont basées sur les émotions et les automatismes ? Alors, ouvrez d'abord la porte émotionnelle pour que la raison suive, parce que l'être humain est un être "rationalisant" : il rationalise à postériori pour se rassurer et justifier sa décision.
3. Comprendre les motivations
Le mot motivation, vient du latin movere qui signifie : mouvement. La motivation est donc ce qui nous met en mouvement. Nous bougeons pour obtenir rapidement (récompense anticipée) ou pour éviter (problème présent ou redouté). Et d'après vous, qu'est ce qui nous fait bouger le plus vite : l'envie de quelque chose ou la peur ?
Et cette mécanique bien huilée peut être utilisée de plusieurs façons :
- Répondre à un problème, une peur, une crainte est de loin ce qui a le plus d'impact comme moteur de décision. Les vendeurs de chaudières le savent bien : les clients qui font des devis et ne se décident pas malgré les bénéfices mis en avant. Et quand le problème survient (ça y est, la chaudière est en panne !) alors cela devient une urgence et la décision est beaucoup plus facile à prendre.
- Créer du désir : valoriser des bénéfices clients proches, tangibles et vérifiables, faire visualiser le résultat. Qui n'a jamais craqué devant une bonne odeur de croissant dans une boulangerie ?
- Mettre côte-à-côte ce que le client gagne rapidement et ce qu'il cesse de subir (ou le soulagement d'un risque) crée un double ressort motivationnel
- A l'inverse, ne pas négliger la puissance des irritants, sur le parcours d'achat du prospect. Ils se transforment très vite en arrêt définitif.
Votre capacité à poser les bonnes questions et à décoder est donc essentielle. Le client vous donne des informations, son contexte et un discours qui semble rationnels, vous devez apprendre à voir au delà de cette façade. Derrière le prix et les fonctions se cachent besoins de sécurité, simplicité, temps gagné, image. Observez et écoutez les répétitions, repérez ce qui déclenche l'émotion : c’est là que se cache le vrai moteur.
Et surtout, évitez de projeter vos propres motivations et peurs. Restez focus sur le prospect. Vous pouvez reformuler ce que vous entendez et testez vos hypothèses : « J'ai l'impression que ce point est essentiel pour vous ? ».
4. Décision d'achat : comprendre et accompagner le processus
Mieux vendre c'est aussi s’intéresser aux mécanismes inconscients qui pilotent les décisions d’achat.

Neurovente : développer son empathie cognitive
Un achat, ce n'est pas un moment isolé, c’est un enchainement de micro-décisions portées par des représentations mentales, de l’émotion, de la mémoire et des biais cognitifs. Les connaître, c’est disposer d’une carte pour éviter les impasses.
La carte n’est pas le territoire… mais elle vous évite de tourner en rond et vous aide activer les leviers de la persuasion au bon moment.
La carte n’est pas le territoire… mais elle vous évite de tourner en rond et vous aide activer les leviers de la persuasion au bon moment.
Le cerveau représente environ 3 % de notre poids mais 20 % de notre consommation énergétique. Par conséquent, il préfère fonctionner la majorité du temps en mode automatique tout simplement parce que c'est beaucoup moins énergivore ! Nous prenons 5000 à 6000 décisions par jour et 70 à 95 % de ces décisions sont ainsi prises en mode automatique (2).
Si cette stratégie, issue de notre évolution, est complètement adaptée sur des sujets connus et maitrisés, elle n'est clairement pas optimale sur quelque chose de complexe. Or faire confiance à quelqu'un, à propos d'un produit ou service qu'on connait mal, pour un bénéfice futur espéré et en plus lui laisser de l'argent (difficile à gagner), c'est hyper complexe pour notre cerveau.
Ajoutez à cela le fait que sous stress ou surcharge, le cortex préfrontal (véritable chef d’orchestre de la régulation) patine ; le statu quo l'emporte mécaniquement. C'est le fameux "je vais réfléchir" ou "rappelez-moi dans 3 mois".
Enfin, malheureusement pour le vendeur : être convaincu ne signifie pas forcément passer à l’action. C’est le célèbre écart intention–action : on adhère au raisonnement… puis on n’exécute pas, faute de marche suivante visible et facile, d’une friction ou d’un coût psychologique mal évalué. Comprendre ce mécanisme, c’est savoir aller au delà de la persuasion pour véritablement conclure et ainsi améliorer son taux de transformation.
5. Dépasser les objections
Le cerveau surpondère le négatif (biais de négativité) et craint davantage une perte potentielle qu’un gain équivalent (biais d'aversion à la perte). Aussi, pour bien traiter une objection vous devez prendre ce mécanisme en compte.
Ajoutez la réactance psychologique : dès qu’une personne se sent contrainte ou privée de choix, elle résiste par principe, parfois contre son propre intérêt. L’objectif n’est donc pas de « casser » l’objection, mais de reclassifier la menace perçue et de rendre le contrôle à l’acheteur pour que le système d’alarme se calme. Ainsi accueillir véritablement l'objection n'est pas un "truc de vendeur", c'est un véritable moyen de désamorcer cet effet de réactance.
Un exemple : "C'est trop cher !"
" C'est vrai que cela représente un budget, maintenant, dites-m'en plus : trop cher par rapport à quoi exactement ?"
" C'est vrai que cela représente un budget, maintenant, dites-m'en plus : trop cher par rapport à quoi exactement ?"
Tout au long de la relation commerciale, rester connecté aux différents cerveaux (émotionnel, rationnel, mémoire, etc.) permet d’adapter son argumentaire et de conserver un lien relationnel fort.
Lire aussi : 6 erreurs face à l'objection
Cultiver votre mental commercial
6. Préparation mentale : la méthode des sportifs de haut niveau

Préparation mentale pour sportifs et vendeurs
Le monde du sport a un temps d’avance sur le marketing, la vente et le management dans le registre de l’application des neurosciences. En coaching sportif, on utilise les neurosciences pour améliorer les performances :
- visualisation ;
- gestion du stress ;
- concentration ;
- ancrage mental ;
- Et comme le sportif maitrise parfaitement ses gestes de base, vous devez développer certains réflexes mentaux. L'entrainement est la clé.
Si cela aide l'athlète à être performant sous pression et au bon moment cela devrait aussi fonctionner pour un vendeur, non ? Même logique : clarifier l’intention, stabiliser l’attention, changer un état interne avant d’entrer en action.
7. Stress de la vente : garder ses moyens face à toute situation
Vous avez lu des livres sur la vente, suivi des formations, vous connaissez votre produit sur le bout des doigts, et pourtant vous avez toujours des difficultés quand ça se corse ? Manque de confiance, objection inattendue, personnalité abrasive, stress qui monte lors d'un enjeu important…
Être destabilisé n’est pas une fatalité.
- Dans certaines situations précises, vous sentez que vous êtes moins bon ? Vous perdez vos moyens ? ou vous êtes mal à l'aise ? Il est possible de désamorcer ces situations gâchettes pour rester serein quoi qu'il arrive.
- Vous savez pourtant ce qu’il faudrait faire, mais quelque chose vous bloque ? Cela signifie peut être qu'il est temps de déconstruire vos croyances limitantes.
Apprenez à reconnaître vos signaux internes (tension, ruminations, accélération de la voix) et outillez-vous : respiration lente, recentrage sur l’objectif du client, reformulation neutre. L’idée n’est pas d’éteindre l’émotion, mais de l'apprivoiser. Une émotion canalisée devient un capteur : elle vous dit où ça gratte chez l’autre. Votre énergie revient au bon endroit : l’écoute et la résolution.
Comprendre ses propres processus internes et savoir les reconnaître lorsqu’ils se présentent permet de mieux s’en préserver et de focaliser son énergie sur le client. Les neurosciences aident à travailler sur soi pour lever les freins, à développer la confiance en soi et à apprivoiser son stress et son égo. L'objectif est de découvrir sa véritable zone de croissance commerciale.
8. Mental du vendeur, la partie immergée de la performance commerciale

Le mental du vendeur comme source de performance
Vos manques de résultats peuvent provenir du fait que vous vous concentrez uniquement sur la partie émergée de votre iceberg mental :
- Vos comportements
- La maitrise de votre argumentaire et de vos outils
- Et les techniques de vente que vous utilisez.
Bien sûr, ces 3 piliers de la vente sont importants, mais c’est très loin d’être suffisant. Dans ma longue expérience de coaching et de formation, j’ai pu observer que les techniques de vente représentent 30 % de votre réussite. Le reste, c'est le mental.
Qu’est-ce qui se cache du côté de la partie immergée de votre iceberg mental ?
- vos motivations ;
- vos croyances ;
- vos représentations sociales ;
- vos valeurs ;
- vos propres biais cognitifs ;
- vos sources de stress ;
- vos peurs, etc.
Pour résumer, 70 % de la réussite d’une vente se situe dans le mental ! La bonne nouvelle, c’est que les neurosciences vous aident justement à développer votre mental.
9. Vendre mieux et avec plus de plaisir : l'efficacité qui dure
Au-delà de l’impact sur vos ventes et votre chiffre d’affaires, les neurosciences vous aident aussi à découvrir ou redécouvrir le plaisir de vendre. Avec une autre vision de la vente, des clients et de vous-même au passage, vous ouvrez les portes vers une pratique de la vente plus conforme à vos attentes, vos ambitions et vos valeurs.
La vente vous ennuie ou vous avez l'impression d'en avoir fait le tour ? C’est peut-être le signe que vous n’évoluez plus dans vos pratiques ? Vous détestez la prospection téléphonique et pourtant ça fait partie du job ? L’apprentissage des neurosciences appliquées à la vente peut réveiller votre curiosité et vous redonner une véritable envie de progresser.
Concrètement, il s'agit de ne plus être focalisé uniquement sur vos motivations extrinsèques (votre objectif, la reconnaissance du client, de votre manager, votre prime...). Ces motivations sont certes utiles mais consommatrices d'énergie et peu résistantes à l'échec. Les neurosciences vous permettent d'identifier, d'explorer et d'optimiser vos motivations intrinsèques, ce sont vos ressources d'énergie et de talents naturels (le sens et le plaisir indépendants du résultat obtenu).
Concrètement, il s'agit de ne plus être focalisé uniquement sur vos motivations extrinsèques (votre objectif, la reconnaissance du client, de votre manager, votre prime...). Ces motivations sont certes utiles mais consommatrices d'énergie et peu résistantes à l'échec. Les neurosciences vous permettent d'identifier, d'explorer et d'optimiser vos motivations intrinsèques, ce sont vos ressources d'énergie et de talents naturels (le sens et le plaisir indépendants du résultat obtenu).
Le plaisir est bien un moteur de performance et, cerise sur le gâteau, il alimente la connexion émotionnelle avec votre client.
En conclusion, les sciences du cerveau s’intéressent à l’aspect humain de la vente et dépassent largement l’aspect technique. Vendre, ce n’est pas empiler des arguments devant une machine rationnelle. Vendre, c’est trouver un chemin compatible avec un cerveau prudent, émotionnel et social.
Et la neurovente n’est pas un slogan : c’est une nouvelle approche respectueuse de l'acheteur et du commercial. Elle réconcilie efficacité et plaisir : moins d’effort cognitif pour l’acheteur, plus de satisfaction pour le vendeur.
Si les neurosciences offrent des éclairages puissants sur les mécanismes décisionnels, ce n'est pas non plus une baguette magique pour transformer un prospect réticent en client conquis. Chaque cerveau est unique, influencé par l’histoire, les valeurs, le contexte émotionnel du moment. Ce qui fonctionne avec un client peut échouer avec un autre. Enfin, comprendre un biais cognitif ne suffit pas : encore faut-il savoir en tenir compte avec finesse, sans manipuler. Le bon commercial ne se contente pas d’“activer des leviers neuronaux”, il écoute, il observe, il ajuste. La neurovente est un outil, pas une recette. Elle complète l’intelligence commerciale, elle ne la remplace pas.
Sources : (1) Damasio, A. (1994). Descartes' Error: Emotion, Reason, and the Human Brain. New York: Putnam.
(2) Fradin, J. IME - Institut de Médecine Environnementale
(2) Fradin, J. IME - Institut de Médecine Environnementale
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Vos réactions (1)
Très intéressant cet article qui fait la synthèse des moteurs et des freins inconscients du client. le plus important n'étant pas d'utiliser cette connaaissance pour "forcer" la vente mais plutôt pour aller à la rencontre de l'autre, au delà de nos biais respectifs :-)
Oui, c'est exactement ça ! Et ce qui rend la vente aussi passionnante c'est bien cette dimension humaine. Merci de ce commentaire, ça fait toujours plaisir.