Le changement c'est maintenant ?

Pourquoi le cerveau résiste au changement
Photo by Ross Findon on Unsplash
Qui n’a pas déjà pris de bonnes résolutions et vu sa belle volonté fondre comme neige au soleil ? Quel manager n’a pas été déçu, frustré de voir un projet qui "patine" ou s'étiole ? Quel commercial ne s’est pas dit « cette année, c’est décidé je passe plus de temps sur la prospection », pour finalement procrastiner ? 70 % des projets de transformation échouent ! Mais pourquoi donc est-ce si difficile de changer ?
Quel paradoxe ! D’un côté, notre cerveau a besoin de changement pour rester en forme et vivre dans un environnement en perpétuel mouvement. De l’autre côté le cerveau déteste changer et modifier ses habitudes. Comprendre cette dualité, c’est finalement développer son libre arbitre et découvrir que tout le monde peut changer, et ça, c’est une bonne nouvelle !
Explorons ensemble les mécanismes mentaux de la résistance au changement et les apports des neurosciences pour les dépasser.
Au sommaire de cet article
- Pourquoi notre cerveau résiste au changement
- 1 - Un réflexe de survie : le rôle de l'amygdale
- 2 - La naissance, premier changement de notre vie, pour le meilleur & le pire !
- 3 - Le cerveau est fainéant
- 4 - La balance bénéfice / effort
- 5 - Changer, c'est prendre le risque de modifier sa place dans le groupe
- Changement subi, changement choisi, quelle différence ?
- Neurosciences appliquées à la gestion du changement
- Neuroplasticité : le changement demande du temps
- L'impact émotionnel est au coeur du processus de changement
- Le changement ça s'apprend
- En conslusion
Pourquoi notre cerveau résiste au changement
Les sciences cognitives et comportementales nous montrent que cette résistance est initialement une question de survie. D’où la puissance des freins !
1 - Un réflexe de survie : le rôle de l'amygdale
La résistance au changement est instinctive, une réaction qui nous met en alerte pour éviter un potentiel danger.
Au fil de l'évolution, notre cerveau a développé des mécanismes de survie essentiels, notamment au niveau des amygdales, situées dans le système limbique. Ces structures agissent comme des sentinelles, déclenchant un état d’alerte face à tout changement perçu comme une menace. Nos ancêtres homo sapiens, n'avaient pas le droit à l'erreur : l'inconnu, le changement pouvait signifier un danger mortel. Ce réflexe de précaution, adapté à un environnement hostile, a joué un rôle clé dans la survie de notre espèce.
Aujourd’hui, bien que le danger soit moins réel, ce mécanisme reste profondément ancré en nous. Il influence notre réaction face au changement et freine notre adaptabilité. Le problème ? Ce frein s'active aussi bien sur un petit changement d'habitude que sur un changement organisationnel.
2 - La naissance, premier changement de notre vie, pour le meilleur & le pire !
Plus proche de nous, la naissance est un premier changement également très violent, qui marque notre arrivée dans le monde. Le bébé, après un passage déjà étroit et compliqué, se retrouve face au monde extérieur.
Soudain, il découvre les sensations de froid, le bruit, la lumière, les poumons qui se mettent en action… Cette expérience de survie au changement reste encodée dans notre mémoire inconsciente.
3 - Le cerveau est fainéant
Le cerveau à l’obligation vitale de limiter ses dépenses énergétiques, car il représente 2% de notre poids mais consomme 20% de notre énergie. Fonctionner à l’économie est donc un réflexe naturel et sain, d'un point de vue physiologique, rendant tout changement complexe à accepter.
Spontanément, le cerveau privilégie donc :
- Le connu : synonyme de sécurité,
- Les habitudes, les automatismes : la fameuse zone de confort,
- Les raccourcis : c’est le terreau d’un certain nombre de nos biais cognitifs.
- Le connu : synonyme de sécurité,
- Les habitudes, les automatismes : la fameuse zone de confort,
- Les raccourcis : c’est le terreau d’un certain nombre de nos biais cognitifs.
Et voici sans doute les biais cognitifs les plus puissants en matière de résistance au changement :
-> biais de statu quo : “On a toujours fait comme ça, il y a bien une raison.”,
-> biais de conformité sociale : “Faire comme tout le monde, c'est plus sûr”,
-> biais de négativité voir : "De toute façon, ça ne marchera pas",
-> aversion à la perte : "Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras".
-> biais de statu quo : “On a toujours fait comme ça, il y a bien une raison.”,
-> biais de conformité sociale : “Faire comme tout le monde, c'est plus sûr”,
-> biais de négativité voir : "De toute façon, ça ne marchera pas",
-> aversion à la perte : "Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras".
4 - La balance bénéfice / effort

Optimiser les bénéfices et minimiser les coûts, les efforts, les risques
Image par Mediamodifier de Pixabay
La gestion de l’équilibre entre les coûts et les bénéfices est cruciale pour la survie de tous les animaux. Dame nature a bien fait les choses : la quantité d’énergie fournie pour l’action est proportionnelle à la récompense espérée. Par exemple, dans une équipe commerciale, c'est le principe classique de la prime sur objectif.
Ce principe de régulation, mieux connu sous le nom de circuit de la récompense, occupe une place centrale dans notre fonctionnement.
Le problème est que notre cerveau recherche un plaisir directement lié à l’action donc instantané. Or, à l’inverse, changer réclame le plus souvent des efforts immédiats pour un bénéfice prévu à moyen ou long terme et parfois même incertain. La balance neuronale est dans ce cas perçue comme étant déséquilibrée.
En outre, être motivé par la récompense du changement n’est pas forcément la même chose que faire des efforts. Faire des efforts, c’est trouver l’énergie, les ressources pour dépasser les obstacles, résister aux difficultés, tenir dans la durée.
Les recherches en cours montrent qu’il y aurait bien, en complément du circuit de la récompense, un système propre à la gestion de l’effort. En effet, l’effort implique un contrôle du comportement : décider d’agir, malgré les coûts, ou plus simplement arbitrer entre plusieurs actions possibles.
5 - Changer, c'est prendre le risque de modifier sa place dans le groupe
Nous sommes des animaux sociaux et dans le changement notre instinct grégaire peut aussi être malmené : remise en question de notre statut social, sensation de ne pas trouver sa place, perte de légitimité, peur du jugement, peur de l’image de l’échec...
Si vous avez déjà participé à un déménagement d’entreprise vous avez pu constater la dépense d’énergie, de temps pour savoir qui aura le bureau le plus proche du chef et celui qui ne veut pas être près de la photocopieuse !
En résumé, nous disposons d’un véritable arsenal pour faire de la résistance forcenée au changement, jusqu’à faire échouer nos raisonnements les plus rationnels, nos tentatives d’impulser de la nouveauté et l'atteinte de nos objectifs.
Et si changer impliquait d’apprendre à composer avec ces réactions pour mieux les inhiber, les apprivoiser ou parfois simplement faire avec…
Changement subi, changement choisi, quelle différence ?
Nous pourrions penser que le changement choisi est facile et le changement subi est difficile. Ce n’est pas si simple…
C’est vrai que nous aimons le changement, qui attire, excite et motive. L’intérêt pour ce qui est nouveau fait partie de notre développement naturel : vous étiez curieux dans l’enfance, cet attrait pour de nouvelles expériences est à la base de tout apprentissage et donc, de tout changement positif. Notre curiosité est ainsi un levier fondamental. Malheureusement pas toujours suffisant…
La puissance de nos réflexes instinctifs, de nos automatismes sont les véritables freins aux changements et expliquent pourquoi il ne suffit pas de décider, ni même d’avoir envie pour réussir à changer. On comprend mieux le nombre de projets ou de bonnes résolutions qui font « Pschitt » ! L’impulsion et l’envie de départ ne sont pas toujours suffisants pour passer le cap du changement profond des habitudes.
A l’inverse, parfois un changement subi, qui interdit ou limite un retour en arrière vers la zone de confort, peut finalement permettre de diminuer le temps de la phase d’instabilité et d’inconfort. Le changement subi est perçu comme une contrainte, mais paradoxalement, c’est la contrainte qui oblige souvent au changement.
Ainsi, les crises sont systématiquement des accélérateurs de changement. Observez notre capacité à nous adapter pendant la crise de la Covid : développement du télétravail, intégration d’outils collaboratifs, accélération de la relation client à distance… Qui aurait pu prédire que nous étions capables de réaliser à grande échelle de tels changements en si peu de temps ? Quand la pression incite à l’action…
Neurosciences appliquées à la gestion du changement
Les neurosciences proposent des clés précises surmonter les freins au changement.
Oui, certaines de nos fonctions cérébrales servent à nous protéger et en même temps nous possédons tous de formidables capacités d’adaptation et d’évolution. Pour réussir à les mettre en action, il faut apprendre à respecter le fonctionnement Humain.
Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s'adaptent le mieux aux changements."
Neuroplasticité : le changement demande du temps

Changer c'est activer sa neuroplasticité
Changer est un processus d’apprentissage : C’est intégrer de nouveaux comportements, les adapter et surtout abandonner des comportements anciens. Ce n'est pas rien ! Le changement est un long et complexe jeu d’ajustements entre nos capacités cognitives, nos apprentissages, nos motivations, nos émotions et bien sûr nos actions. La prise de décision est une étape nécessaire mais rarement suffisante de ce processus.
Changer, c’est physiologiquement créer de nouvelles connexions neuronales, et pour cela notre cerveau a besoin de temps. C’est sortir de l’autoroute pour prendre un chemin de traverse. En revanche, plus vous empruntez ce nouveau chemin, plus cela devient facile, jusqu’au jour où ce chemin sera une nouvelle habitude.
Intégrer de nouvelles habitudes demande un effort initial important, mais renforce durablement la neuroplasticité et in fine l'adaptabilité.
L'impact émotionnel est au coeur du processus de changement
Pour changer et dépasser les résistances au changement, la dimension cognitive est importante (comprendre le sens et la nécessité de changement) certes, mais vous devez en priorité considérer la dimension émotionnelle. Parce que l'émotion précède la pensée consciente et l’action.
1 - Lever les freins du « mode automatique », le poids des habitudes de la zone connue et maitrisée.
2 - Accepter la courbe du deuil liée au changement (“On sait ce que l'on perd, mais on ne sait pas ce que l'on gagne”),
3 - Dépasser la peur de l’inconnu,
2 - Accepter la courbe du deuil liée au changement (“On sait ce que l'on perd, mais on ne sait pas ce que l'on gagne”),
3 - Dépasser la peur de l’inconnu,
Par exemple, je me souviens d'un commercial en formation confronté à l'adoption de nouvelles techniques de vente. Sa résistance était focalisée sur le fait de poser des questions à son prospect sur la concurrence : "ça ne se fait pas", "il va m'envoyer paître". Bref, les voyants de la résistance au changement sont au rouge !
Sa peur de la réaction de l'acheteur était son principal frein au changement. En utilisant des jalons progressifs pour apprivoiser cette peur et du feedback positif, il a réussi à oser tester puis à exceller.
Abordées de cette façon, "l’excusite aigüe" et la procrastination sont davantage des questions de gestion des émotions, qu’un véritable problème de gestion du temps ou d'organisation. La phase de perte de repères et d’inconfort nécessaire à tout changement peut toucher de plein fouet la confiance en soi, le besoin de maitrise et de perfectionnisme.
Nos émotions peuvent être des freins ou à l’inverse des moteurs. Aussi, la motivation et les émotions positives sont une clés indispensable dans le processus du changement. Cherchez à en distiller tout au long du processus de changement et pas uniquement lorsque vous franchissez la ligne d’arrivée.
Il est également nécessaire d’intégrer des motivations indépendantes du résultat à atteindre. Des motivations qui entretiennent le plaisir pendant la phase délicate d’effort et de destabilisation. L’objectif ici est de maximiser les bénéfices afin que la balance bénéfice / effort reste bien orientée en faveur de la poursuite du changement.
Le changement ça s'apprend
Notre mode adaptatif, avec comme chef d'orchestre le cortex pré-frontal, est un allié de taille face à cette lutte interne entre bénéfice / effort, entre raison / émotion . Une de ses fonctions est justement de réguler nos émotions.
Les techniques pour surmonter la résistance au changement cherchent à :
- dépasser nos réactions instinctives,
- prendre du recul,
- apprivoiser nos émotions,.
- être créatif pour identifier des ressources, des moyens
- renforcer nos motivations pour le changement.
- dépasser nos réactions instinctives,
- prendre du recul,
- apprivoiser nos émotions,.
- être créatif pour identifier des ressources, des moyens
- renforcer nos motivations pour le changement.

Changement collectif ou individuel
Photo by Spencer Davis on Unsplash
Nous ne sommes pas tous égaux face aux changements : Certains auront davantage de facilité à dépasser les freins et automatismes, à recruter leur mode adaptatif, à mobiliser différentes ressources de motivations. D’autres, avec la peur, leurs croyances ou simplement la fatigue auront tendance à se réfugier dans leur zone de confort.
Néanmoins, les mécanismes cérébraux et la neuroplasticité sont bien universelles et notre capacité à nous adapter, à changer est souvent sous-estimée. Toute personne munie d’un cerveau peut changer et la personne qui vous dit « ce n’est pas à mon âge que je vais changer » vous raconte des histoires ou le plus souvent se raconte des histoires. En réalité elle ne veut pas ou ne sait pas comment changer.
En conslusion
Une stratégie de gestion de la résistance doit concilier dimension cognitive et dimension émotionnelle. Il peut s’agir d’une "petite" stratégie, s’il s’agit d’un petit changement individuel, tel que ne plus regarder ses mails avant de s’endormir. Ou bien de solutions plus élaborées lors d’un grand changement collectif tel que le déploiement d’un projet d’entreprise.
Et s’il suffisait de connaitre et de respecter le fonctionnement naturel du cerveau, pour diminuer les résistances et rendre le changement beaucoup plus facile. Oui, mais comment ? Dans mon prochain article je partage 20 actions concrètes pour passer du besoin ou de l’envie de changer à savoir changer.
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Vos réactions (2)
Bonjour Karine,
Merci pour l’article sur la résistance au changement expliqué via les neurosciences. Cela fait écho au livre d’Anne-Laure Nouvion - Accompagner le changement avec les neurosciences. Merci pour ta précision et les exemples illustratifs.
Estelle Roussel
Formatrice et Coach à l’OB
Bonjour Karine,
Merci pour l’article sur la résistance au changement expliqué via les neurosciences. Cela fait écho au livre d’Anne-Laure Nouvion - Accompagner le changement avec les neurosciences. Merci pour ta précision et les exemples illustratifs.
Estelle Roussel
Formatrice et Coach à l’OB